Francq Radio, le récepteur de l’élite made in Pau

C’était lors d’un des nombreux vide greniers dominicaux, en fin de journée, il était toujours là dans un coin de parking, il faut dire qu’il fallait passer outre cinq mètres linéaires de lunettes et de brosses à chiotte pour le dénicher, ce combiné radio platine vinyle habillé de bois. Un haut parleur et quatre boutons en frontal avec ce cadran, récepteur de grandes ondes de Moscou à Rabat en passant par Stuttgart et Londres. Sur le dessus, un capot s’ouvre sur la platine. Derrière, le câble d’alimentation s’effrite, les autres fils électriques ne sont pas dans un état terrible non plus. Les lampes sont là, propres, en état de marche ? Mystère. Le vendeur n’a jamais cherché à le faire fonctionner, son usage était purement décoratif. Oui, ça fera joli sur une étagère. Le bois n’est pas abîmé, il est usé juste ce qu’il faut pour paraître « d’époque ».

Et puis au dos, il a aussi une plaque amovible pour cacher l’organisme de la bestiole, dessus, il a écrit « Francq Pau, le récepteur de l’élite », il aurait donc été assemblé à Pau ? Voilà qui justifiait quelques recherches …

Les Francq sont une famille d’industriels originaires du Nord de la France, Roger débute sa carrière comme ingénieur sur le chantier des tramways de Lille, puis il dirigera la société des Forces Electriques à Bakou puis, toujours dans la Russie des Tsars, une usine métallurgique à Briansk. Après la première guerre mondiale, il se met au vert dans le Béarn avec femme et enfants et se lance dans l’expérimentation du soja et du tournesol. C’est Marcelin, son fils aîné qui fondera en 1928 les Radio Francq, puis en 1958  une coopérative d’électroménager. Il sera aussi vice-président de la Chambre de Commerce de Pau dans les années 70.

80 ans avant le règne de l’enceinte Bluetooth, Pau fabriquait donc son propre matériel pour envahir les salons de décibels, les ateliers étaient sur la route de Tarbes, au 51 avenue Erckman Chatrian à Lons, il y a aujourd’hui une petite place avec un boulanger, un camion à pizza et ce qui pouvait être un local industriel est aménagé en habitats privés, sur l’arche du portillon, repeinte à neuf, reste le logo « Francq Radio ». Selon le site spécialisé DOCTSF, le modèle déniché en ce 14 juillet serait sorti de là en 1953 sous le nom de Chevet 53.

Platine Teppaz, haut parleur Audax, du matériel haut de gamme pour slogan publicitaire qui ne tolère de toute façon pas moins. Après la seconde guerre mondiale, la France a soif de vivre, elle veut une voiture pour aller voir la mer, une télévision pour regarder Léon Zitrone en rentrant du travail, la bourgeoisie paloise achète son combiné Chevet 53 dans un magasin d’électroménager de la rue Saint Louis. Quand on récupère un de ces vieux machins, il est fascinant de penser à sa vie passée, sa vie active avant de devenir une relique, comme un 45T, quand il y a écrit « Pour Bernadette » dessus, est-ce qu’il a tourné lors d’une boom ? Est-ce que Bernadette a dansé dessus dans sa chambre ? Et ce Chevet 53, qui était son propriétaire ? Quelle utilisation en avait-il ?  Etait ce un jeune zazou argenté fou de jazz comme les héros de Boris Vian dans L’Ecume des Jours ? Organisait-il des soirées dans un grand appartement du boulevard des Pyrénées ? Ou est-ce que l’aiguille des stations restait sur la radio nationale et que Tino Rossi et Luis Mariano se succédaient sur la platine vinyle ? Oui, plus probablement …

 

There are 3 comments for this article
    • Julien B at 9 h 19 min

      Bonjour, content que cet article vous ait plu ! L’objet trône toujours dans mon salon !

  1. FRANCQ Jean-Luc at 22 h 47 min

    Bonjour, je pensais que les FRANCQ étaient tous originaires du Nord de la France et de la Belgique, ben là, je tombe sur le cul….

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