Roberto Fonseca & New Bulgarian Voices – Jazz In Marciac – 01/08/2021

Roberto Fonseca est chez lui à Marciac…. Depuis plusieurs années et pour le plaisir de ses multiples fans, il est l’invité régulier, incontournable du festival gersois, un véritable rendez vous amoureux pour ce charmeur dans l’âme qui aime faire chanter son public.
 «C’est bien de revenir à la maison !» dit il en préambule. 
On l’aime autant pour sa vitalité débordante que pour son contact facile et chaleureux et sa musique vive et métissée. 

Né à La Havane dans une famille de musiciens, père batteur, mère chanteuse, Roberto Fonseca est aujourd’hui l’une des figures emblématiques de l’extraordinaire rayonnement cubain. Il a usé ses claviers au sein du groupe Buena Vista Social Club puis aux côtés du mythique chanteur de boléro Ibrahim Ferrer avant de prendre son envol. C’est dire s’il est un héritier direct de la musique cubaine. Il possède un groove et une vélocité époustouflante. 
Mais pas seulement. Depuis plusieurs années, il développe parallèlement une musique moderniste où fusionnent allègrement jazz, funk et soul afro cubaine, à la fois ancrée dans l’ histoire et ses traditions mais ouverte à l’actualité et à la diversité des musiques du monde entier. 
Ces nombreux disques en sont une preuve. Tout l’intéresse et l’interroge : le jazz bien sûr, son encrage majeur, la musique classique en passant par le rap, le funk, le reggaeton et l’électro, traçant ainsi un chemin singulier, improvisé, affranchi des règles et tellement séduisant. 

Ce soir c’est à un autre voyage qu’il nous convie, un voyage vers l’Orient proche, vers un chant diaphonique, héritier des chants d’église mais aussi du folklore traditionnel : le chant bulgare. 
Drôle d’équipage que celui là : les cubains des îles et les longues filles hiératiques de l’Est, les oiseaux-mouche aux mille battements d’ailes et les sages tourterelles des brumes. 

Le concert débute par trois morceaux qui campent le propos. Jazz en diable mais mélancoliques aussi : une belle balade mélancolique et douce dans laquelle il déploie toute sa virtuosité et qui finit en apothéose rythmique, un tango où la contrebasse (Yandy Martinez, délicat et coloré) tient parfois le thème puis le tempo et un morceau impressionniste, tourné vers la musique de film, mêlé de voix enregistrées. Les couleurs sont moins solaires, plus graves mais toujours cubanas pour l’âme. 
La batterie toute en légèreté précise de Ruly Herrera soutient avec justesse ces trois premiers morceaux.
 A l’arrivée des huit chanteuses, Fonseca se met à l’orgue pour un chant solennel à l’unisson et pleine voix. Il passera ensuite au piano et au Moog selon les morceaux.
 Puis d’autres chants vont suivre ou Fonseca et ses musiciens se feront accompagnateurs et coloristes, limpides et chatoyants. 

Le style des voix bulgares est caractérisé par la dissonance (nombreux intervalles de seconde, septième et neuvième), par l’échelle modale et le rythme syncopé.
 Ils sont toujours chantés en antiphonie à pleine voix par deux groupes, le premier commence le chant, le second le termine. On obtient ainsi un chant en chaîne jusqu’à la fin du texte. Dans sa structure, c’est un chant très écrit, très codifié. Les couleurs des voix sont aiguës dans leur ensemble à part un bourdon (là elles sont deux apparemment) et puissantes dans le volume. Pas de nuances, peu de solos. 
Georgi Petkov dirigent les jeunes filles avec attention. Au fur et à mesure, les corps un peu raides des huit chanteuses vont s’assouplir, les bras se balancer légèrement… mais le chant lui garde sa base : appui sur le premier temps et couleur nasale, dans le masque.
 Un chant a capella, sans musiciens, nous en donnera toute l’ampleur et la beauté éternelle. L’émotion qui le soutient est bien réelle. 

Mais le lien se fait il entre les deux mondes ? Fonseca peut mettre en jazz n’importe quelle mélodie et il ne se prive pas de le faire avec ces mélodies bulgares. Tantôt en percussions, tantôt en délicates plongées, il les décortique et les fait vivre autrement. 
L’inverse n’est pas vrai. Le chœur fait ce qu’il sait faire (magnifiquement !) mais ne peut pas s’inscrire ni dans le groove ni dans la couleur cubaine et c’est normal. Ils sont le plus souvent à côté les uns des autres pour des morceaux qui malgré tout restent beaux à écouter. La fusion ne se fait pas ou fort peu mais le compagnonnage est vraiment intéressant. 

L’idée de cette universalité de la musique est une idée ancienne, une quête qui relève du Graal pour certains, de la réalité pour d’autres. 
Roberto Fonseca, avec tout son talent et sa fougue a le mérite de créer des ponts entre des mondes différents. Une nécessité vitale pour que les cultures s’enrichissent mutuellement et s’acceptent à égalité.

Le site officiel Jazz In Marciac : Cliquez ici
Photos : © Thierry Dubuc : Cliquez ici
Lieu : Marciac, (FRANCE) | 01/08/2021

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