Lizz Wright – Jazz in Marciac – 24/07/2023

S’il fallait définir le chant de Lizz Wright, beaucoup d’adjectifs viendraient aux lèvres, mais grâce, force et authenticité en seraient les maîtres mots et les premiers marqueurs..

Lizz Wright, c’est la diva soul qui incarne la simplicité, celle que l’on aime entendre pour sa chaleur, sa proximité et son don de soi.
Depuis une quinzaine d’années, elle creuse un sillon nourri de jazz, mais aussi de soul, de blues et de gospel. Et elle le creuse avec une voix absolument remarquable : timbre chaud, à la fois doux et rugueux, puissance et retenue, justesse partout. Elle est d’ores et déjà installée dans le cercle des chanteuses de jazz dont on reconnaît immédiatement le grain, la présence amicale plus que sensuelle. Elle lance sa voix comme on lance des liens de soie (de soi), de l’encens pur et des fleurs de pourpre, avec respect et opiniâtreté, comme une force ancestrale qu’elle s’efforce de tenir et de nous faire partager. Cette impression est immédiate. Et elle persistera tout au long du set. Elle est comme la sœur que l’on voudrait prendre dans ses bras.

Une belle intro de guitare blues, seule dans le halo de lumière pose l’atmosphère avant que démarre un Amazing grace de toute beauté, inspiré et incarné sur un rythme ample et lent. La guitare fait le lien avec le morceau suivant et l’entrée des trois autres musiciens pour un morceau plus groove. Tout au long du concert, les impros musicales s’enchaîneront dont plusieurs magnifiques solos à la guitare sèche ou électrique, aux claviers ou à la basse. Lizz Wright laisse aux musiciens qui l’entourent, tous remarquables, de larges plages d’impros et d’expressions. Les interactions entre chant et instruments sont nombreuses et forment un tissu sonore clair et surtout extrêmement puissant.
Chaque auditeur au fil des morceaux va se laisser bercer, envelopper par cette voix consolante, cette musique qui nous veut et qui nous fait du bien Mercy, mercy. Lizz Wright nous offre tout ce qu’il y a de mieux, sa douceur, sa compréhension et son sens de la lutte.
On se retrouve dans un paysage qui nous semble familier à nous qui en sommes si loin : le vent dans les branches, la chaleur du Sud, le rayon de soleil qui dore les vitraux, le balancement sucré d’un hamac, les bruits inquiétants de la nuit, le toit qui protège si mal et la confiture douce qui réconforte. Toutes ces images se déploient comme des fleurs à travers son chant, son corps et ses sourires.
Aux détours d’un morceau, l’atmosphère se fait parfois plus funk, sa voix s’étale alors et fait merveille, remplissant le chapiteau comme une bulle. Mais la ferveur est toujours présente, le désespoir affleure et l’ascenseur émotionnel nous entortille dans tous les sens. C’est tragique et jubilatoire à la fois.
Elle passera ensuite au piano pour une chanson main-steam large et invocatoire, puis un chant plus gai, plus funky.
L’ensemble des spectateurs est conquis, subjugué par cette sincérité immense, l’allant, la flamme de ses mains tendues.
On finira par un New Deal plein d’espoir et des applaudissement à n’en plus finir…

La musique de Lizz Wright n’est certes pas nouvelle, mais c’est un héritage ; un héritage qu’elle s’efforce avec réussite de sublimer. Faisant partie de cette longue lignée de filles de pasteur, tombées dans le Gospel et les chants d’église dès l’enfance, elle est ce reflet d’une amérique difficile, âpre et injuste, pétrie de mille douleurs mais aussi de mille espoirs et de mille combats qui n’avait souvent pas d’autres perspectives que le chant et la prière.
Comme d’autres avant elle, Lizz Wright chante cette appartenance et cette beauté. Elle incarne une tradition qui nous permet de nous émouvoir, de réfléchir et de sentir. Mais elle le fait avec ses armes à elle, partage et mains ouvertes. Et c’est un vrai bonheur.

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Photos : © Fabien Maigrat
Texte : © Annie Robert
Lieu : Jazz in Marciac (France) | 24/07/2023