Cannibale – Centrifugeuse (Pau) – 29/03/2019
Depuis maintenant quelques saisons culturelles, la Centrifugeuse se plait à accueillir des artistes qui métissent la musique, des Congolais électriques, des Colombiens psychédéliques, toutes les combinaisons sont envisageables. L’affiche franco-italienne de ce vendredi est à priori moins dépaysante. A priori.
De bons échos d’Indianizer arrivaient des Transmusicales de Rennes, les voici chantant en italien, français ou espagnols, les cheveux sur les yeux. On est vite happé dans un univers où le rock rencontre les tropiques, un coup à attraper une bonne fièvre carabinée. Si on ferme les yeux, on peut voir un orchestre de mariachis et la cavalerie au galop, quand on n’est pas pieds nus sur un sable caribéen. Des larsens joignent deux morceaux, usant d’un micro à effets, une puissante voix chamanique envahit l’espace. L’intensité du show apporte de la cohérence au tout, surtout quand arrive le meilleur morceau du dernier album. Hypnotize comme point culminant, fusionne rythmes chaloupés et mécanique krautrock. Indianize, galvanize. Et les photos sont ici…
Si les Italiens ont bien des looks à travers l’Europe à 5 dans un fourgon, on verrait plus les gars de Cannibale regarder la Champion’s League à l’Europub. Mais gare, l’habit ne fait pas l’anthropophage ! Et puis les normands sont déjà passés sur cette scène défendre leur album précédent. Les grenouilles croassent dans le bocage, les mêmes que celles qui ouvrent leur nouveau disque Not Easy to Cook et puis c’est parti. Les gars sont en grande forme. Les morceaux s’enchaînent avec entrain sur une base garage psychédélique mais guitare et clavier toujours s’échappent vers Fort de France. Les chœurs prennent leur voix de fausset, le chanteur lâche ses pas de danse sans avoir peur de mouiller la chemise, comme au mariage de ton oncle. Puis il lève les bras au ciel dans un moment de félicité, comme un prêtre touché par la lumière divine. Si leur musique s’inspire clairement des rythmes des DOM-TOM (sauf de Saint Pierre et Miquelon), il y a aussi de quelque chose de très anglais chez eux. N’oublions pas qu’ils vivent sous les embruns de la Manche. Il faudrait se pencher avec plus d’attention sur les textes, mais sûr qu’on y trouve un humour mêlant absurde et autodérision, plus proche du Monthy Python’s que de Jean Marie Bigard. Et puis la manière de danser est clairement inspirée par le classieux Austin Power, l’autre espion au service de sa majesté, qu’il convient de rattacher à un puissant rejet du « qu’en dira-t-on ». Pourquoi est-ce qu’on ne danse pas, nous ? Pourquoi nos articulations sont soudainement verrouillées alors que le démon de la béguine rentre en nous ? La réponse se trouve au plus profond d’entre nous, on vous laisse y réfléchir. En attendant, profitons de l’héroïque No Mercy for Love en dessert.
Avec humour, le chanteur de Cannibale a plusieurs fois demandé au public : « Etes-vous satisfaits ? » Comme s’ils étaient des prestataires de service, comme s’ils nous avaient repeint le plafond. C’est rigolo, parce que, bien qu’étant de très bons musiciens, ils ont l’air à des kilomètres de considérer ce qu’ils font sur scène comme un métier. Merci pour le panache les gars.
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Photos : © Fabien Maigrat
Texte : © Julien Beylac
Lieu : Centrifugeuse (Pau, FRANCE) | 29/03/2019