[La Reprise du Jeudi] Il y a 100 ans, Johnny revenait d’la guerre

Il y a 100 ans, la guerre était fini et une jeunesse fracassée rentrait chez elle des cauchemars plein la tête, avec une belle médaille au col. Ça leur faisait une belle jambe, s’il leur en restait. Si toutes les guerres sont absurdes, la première guerre mondiale est la plus absurde de toutes. Des chefs d’état d’un autre siècle ont sacrifié quatre ans durant l’avenir de leur pays pour satisfaire leur égo, envoyant des millions d’hommes mourir sous les obus. Il y a  100 ans rentrées chez eux les gueules cassés, hommes amputés ou défigurés qui ne pourraient jamais se réinsérés dans la société. L’an passé, Au revoir là haut le superbe film d’Albert Dupontel avait évoqué le sujet avec poésie. Avant ça, en 1971, Johnny got his gun de Dalton Trumbo montrait d’une façon plus brutale un soldat revenu privé de ses membres et ses sens, ne conservant que ses souvenirs. Un film silencieux et lapidaire qui a inspirait à Metallica son One et aux Béruriers Noirs l’instrumental lugubre Johnny revient d’la guerre. Il y a sur ces quelques notes toute la révoltante réalité, toute la criante horreur.

Et là vous vous demandez le rapport avec la rubrique de la reprise du Jeudi. Vous avez peut être déjà entendu le thème que joue les Bérus à d’autres occasions. Il s’agit du chant When Johnny Comes marching Home, datant de la guerre de sécession américaine, qui souhaitait la fin des hostilités et le retour au foyer des fils et des maris. Les origines de cette chansons sont de ce côté ci de l’Atlantique puisque il s’inspire de Johnny Hardly Knew Ya ballade antiguerre irlandaise qui daterait du début du XIXème siècle. Ce n’est pas un hasard si les Dropkick Murphys en ont enregistré une version sur leur album The Meanest of Times en 2007.

Les Clash ont aussi utilisé ce thème pour leur morceau English Civil War. Nous sommes en 1979, Joe Strummer met en garde contre la montée de l’extrême droite en Angleterre, il voit la guerre à chaque coin de rue : « Johnny hasn’t got far to march. That’s why he is coming by bus or underground ».

Il y a 100 ans, Johnny revenait d’la guerre, mais aussi nos Jean, nos André et nos Marcel. Et puis il y a tous ceux qui ne sont pas revenus.

 

There are 2 comments for this article
  1. Murielle Truchetet at 8 h 03 min

    Aouch
    Tu me tires les larmes dès le matin.
    Tes mots comme du Tardi.
    On voit. Pas que lire.
    Mon arrière grand-père y a été chirurgien dans les tranchées. Il écrivait tous les jours dans des carnets l’horreur.
    Avant de mourir, il revivait les obus qui lui arrivaient dessus et se cachait sous son lit.
    Il a connu celle de 39/45 aussi.
    De quoi remettre du bon plomb dans nos cervelles, à regarder la vie quotidienne qui est la notre parfois. Des gué guerres pour pas grand-chose à nos niveaux individuels. Le point de départ des égos.
    Et de ce qui peut en découler…

    • Julien B at 13 h 25 min

      « Heureux » que cet article vous ait touché, merci pour votre commentaire (ça veut déjà dire que quelqu’un l’a lu !)
      J’ai visité Sarajevo cet été, tout a commencé là ce pont, par l’assassinat de l’archiduc François Ferdinand par un anarchiste serbe.
      Et se dire que l’engrenage des alliances a abouti à presque 10 millions de morts, c’est … absurde, incompréhensible.
      Voilà, cette rubrique de la reprise était l’occasion d’écrire quelques mots à ce sujet.

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