Catherine Ribeiro: 1941 – 2024
Figure française de la musique expérimentale et engagée des années 1970, cette artiste à l’esprit rebelle qui a débuté en tant qu’actrice, a navigué durant sa carrière entre rock progressif et chanson française, connaissant un grand succès sans jamais se compromettre en lorgnant du côté du show-business. Après une tentative de suicide en 1968, Catherine Ribeiro fonde et anime, avec Patrice Moullet, le groupe Alpes en 1969. Lui compose et joue des instruments de son invention, elle, écrit les textes. Leur formation inclassable aurait pu rester confidentielle, mais sa participation au festival pop d’Aix-en-Provence en 1970 lui apporte un coup de projecteur inattendu. Alpes est boudé par les médias rebutés par les textes subversifs, revendicatifs, libertaires et anarchistes que la chanteuse déclame de sa voix grave et profonde. La scène deviendra donc le terrain de prédilection de la formation. En 1977, participation à la première édition du Printemps de Bourges. En mai 1982, trois semaines non-stop à Bobino et, en tout et pour tout, six fois la Fête de l’Humanité devant plus de 100 000 personnes. Des centaines de concerts donc mais aussi une dizaine de disques, dont Paix en 1972, considéré comme leur disque le plus abouti. Celui-là même pour lequel la maison de disques Philipps imposa la mention ″ Les textes de ces chansons n’engagent que leur auteur ″ sur les pochettes. Parallèlement à son parcours avec Alpes, Catherine Ribeiro sort en 1977 un album hommage à Édith Piaf, puis l’année suivante, un disque consacré à Jacques Prévert. Ces dernières années, l’artiste avait pris ses distances avec toute vie publique mais continuait à s’exprimer sur les sujets chers à ses engagements. Ainsi en 2017, s’associant au mouvement #metoo, elle accusait un homme de radio et de télévision de l’avoir sexuellement agressée: ″ J’ai été violée en 1962 et je me suis tue. Si j’avais parlé, cet homme était capable de m’attaquer en justice. Je n’ai prononcé le mot VIOL qu’à 60 ans. Pour moi le dégoût, la honte, la répulsion et la colère sont toujours présents.″ Libre, indomptable et considérée comme l’héritière de Léo Ferré, Catherine Ribeiro s’est éteinte dans une maison de retraite à Martigues à l’âge de 82 ans.
Patrick BETAILLE, août 2024. Pour retrouver tous les articles, Cliquez ici > Black Bonnie!
je ne vais pas dire que j’ai pleuré mais le bourdon m’a envahi, un grand vague à l’âme ; comme quand on perd une grande copine , et puis la lucidité des affranchies (des affranchis aussi) et des libertaires c’est en même temps terriblement beau et angoissant ; j’ai vu sa tournée la Mémoire et la Mer dans un petit théâtre landais, c’était magnifique, sa présence sur scène était incroyable, sa voix, son regard ; ce qui me rassure c’est que sa mort lui évitera de vivre la merde qui s’avance et qui va nous engloutir ! ////// il faut ajouter à cet hommage 2 autres grandes affranchies disparues cet été, Gena Rowlands l’actrice et l’écrivaine Annie Le Brun
Merci Anaïs. Tu as de la chance de l’avoir vue en concert, moi pas et je le regrette. J’aurais tant aimé me laisser envahir en live par la force de ses textes et la beauté de sa présence. Tant pis, ces disques restent et Ayana Nakamura n’y pourra rien changer.
Eh bien oui, quelques larmes ont brouillé ma vue lorsque j’ai appris le décès de Catherine Ribeiro, Elle que j’ai tant écoutée pendant de longues années. Sentiment très étrange que celui d’avoir l’impression qu’une partie de soi nous quitte. Je n’ai jamais eu l’occasion d’assister à aucun de ses concerts (sauf en vidéo) mais, avec Tachan Magny, Solleville, Hélène Martin, Pia Colombo et quelques autres, ce sont à eux sans doute que je dois les idéaux et la chanson que je défends encore aujourd’hui. Elle est partie en rejoindre certains et je suis très très triste.
Bel hommage Jacques, merci. Comme évoqué par ailleurs, je n’ai pas eu l’occasion de voir cette immense artiste en concert mais je dois avouer que ses albums Paix et âme debout ont accompagné avec bonheur une partie de ma jeunesse.