Jean Louis Murat – Regrets
Je l’avoue, dans les années 80 – 90, en pleine hibernation musicale (NDLR j’fais c’que j’veux!), je suis passé à côté de Jean-Louis Murat. Bien sûr, au cours de lectures de la presse spécialisé, durant des zappings radiophoniques ou au hasard de rencontres, j’ai quand même été parfois interpellé par l’approche poétique et la démarche de cet artiste. Sensible aux mots – ceux de Brel, Ferré ou Brassens notamment – je me suis surpris à alimenter un débat sincère avec moi même-myself qui se soldait toujours par un ″ Wow, faut que j’écoute ça! ″. Et puis, une chose en entrainant une autre, je me suis laissé submerger par la pauvreté de la production musicale du moment, la paresse intellectuelle, et le confort de la nostalgie.
Aujourd’hui, je culpabilise de ne pas me sentir légitime pour parler ce poète-musicien. D’autres l’ont fait – bien ou mal – et c’est tant mieux. Après tout ça sert à ça les hommages, même consensuels, indigestes et formatés aux exigences de l’instant post-mortem. Plutôt que de me laisser aller à la facilité en faisant croire que j’ai tout entendu, tout vu, tout su et tout bu (NDLR ça, à la rigueur!) je préfère me contenter de mettre dans la corbeille le fruit de ce que j’ai pu récolter ça et là et qui, à-priori, semble correspondre en tous points à l’idée première que je me faisais à propos de l’auteur, compositeur et interprète qui avouait: ″ Ça me plaît assez qu’on ne m’aime pas ″ en ajoutant: ″ si je suis là ce n’est pas pour faire plaisir aux gens mais pour les déstabiliser, voire les dégoûter ″. Marginal et surtout rebelle il enchérissait: ″ moi, je n’ai pas de d’argent, je n’ai pas de succès, mais au moins, je ne pense pas faire de la chanson démagogique ″. Quant au star system, lui aussi en prenait plein la tronche. Pour Murat, Renaud et Polnareff: ″ des gros cons ″. Idem pour Johnny Halliday: ″ à cause de lui, en France, nous sommes passés pour des tocards pendant cinquante ans ″ disait-il. Ça claque hein?!
Jean Louis-Murat est éteint à la veille de la sortie d’un best of célébrant ses 40 ans de carrière sur lequel je vais me précipiter. Après, je verrai. Mais avant. Avant, je vais me scarifier avec un cutter rouillé, me flageller avec des orties, m’insulter en allemand et me ruiner le fondement avec du gravier pour n’avoir pas su apprécier à temps [NDLR jamais trop tard parait-il mais je merde la sagesse populaire!] cet ambassadeur de Chamalières et de l’Auvergne, bien meilleur, bien moins consensuel et apparemment bien plus marrant qu’un certain Valery Giscard d’Estaing.
Patrick BETAILLE, mai 2023. Cliquez ici pour retrouver tous les articles: Black Bonnie!