Le Son du moment – Serpent / Distant Call
Normalement, à l’Ecran du Son, on n’aime pas trop ce genre de clip… mais bon, celui là est pas mal fait, et on aime bien faire des exceptions de temps à autre.
Post-punk, post-funk et post-moderne, Serpent déchiquette aussi les étiquettes, et ce premier EP sans sommation porte un nom de manifeste : Time for a rethink (Il est temps de repenser).
Remise à zéro, tabula rasa, reboot de la machine, certains parmi ces cinq assaillants étaient en recherche d’une pulsion primitive, animale, reptilienne comme on le dit du cerveau lorsqu’il ne fonctionne qu’à l’instinct. Parmi eux, on reconnaitra Mathieu Lescop, chanteur échappé jadis d’Asyl et qui a depuis réussi l’épineuse équation d’une cold-wave française aux réchauffements pop sur deux albums (Lescop et Echo) remarquables et remarqués. En parallèle à cette voie solitaire, qu’il poursuit sans presser le pas, Mathieu Lescop cherchait à retrouver l’excitation jouissive de l’électricité, de l’écriture collective et intuitive sans cadastre et à assouvir par là des envies d’embrasements.
Tous ont aussi en tête les répliques contemporaines de ces chocs thermiques punk-funk ou noise-cold, des Canadiens de Crack Cloud aux Anglais de Life ou HMLTD en passant par les Brooklyniens de The Rapture. Serpenter autour de cet arbre généalogique leur convient, surtout avec la tension du monde alentour, la confusion qui domine et cette nécessité impérieuse d’écrire sur la brèche, loin de tout romantisme, le feu aux trousses et dans l’hypnose du moment. Avec Robin Leduc à la production, ce quintette entêté fait des étincelles sur ces quatre titres qui donnent l’impression d’un puzzle mal taillé dont on aurait emboité les pièces à coups de marteau. Avec une méthode intuitive qu’on pourrait comparer aux Stratégies Obliques de Brian Eno, faite de contraintes et d’astreintes, ils se sont ainsi lancés des défis parfois absurdes tout doit sortir d’un jet, sans réflexion et de la manière la plus brutale possible, on mesure à l’écoute de Time for a rethink combien la méthode fut fertiles. Avec l’anglais comme première langue, cette fois Lescop s’est aussi donné pour contrainte d’aller à l’essentiel, vers la scansion plutôt que vers la chanson, le chant sensoriel et l’écriture automatique comme autant de flashs dans la nuit et de slogans bombés à la hâte.