Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp, il y a beaucoup d’informations dans ce nom. Orchestre, un groupe de gens qui jouent de la musique, plus avec des instruments qu’en tournant des boutons. Tout puissant, le résultat de leur association aurait une telle ampleur qu’il en serait inatteignable, inébranlable, incontestable. Marcel Duchamp, référence au peintre chantre du Dadaïsme. Alors tout ceci pourrait faire croire que c’est pas pour nous, d’ailleurs on ne sait pas si le Dadaïsme est une religion ou un courant artistique et en plus on pensait que ce monsieur était un chanteur de variété des années 50. Et bien peu importe. Parce que la musique de la troupe suisse fait appel aux sens et non aux connaissances, elle est sincère, spontanée et terriblement vivante.
C’est encore le cas sur leur nouvel album nommé Sauvage Formes, l’ensemble fait désormais quatorze musiciens, avec l’incorporation d’un quatuor de cordes anglais, et ceux qui les ont vu sur scène lors de leurs passages à la Centrifugeuse à Pau savent combien c’est génial quand tout se met en marche, que ça s’affaire avec passion dans tous les recoins, le dynamisme du xylophone, l’émotion des cordes. Blow emprunte ses cuivres prophétiques au monumental You goin’ miss your Candyman de Terry Callier. La fluidité, l’unicité de la chose impressionne, simple et puissant comme un souffle, alors que Across the Moor, après une longue approche, fait découvrir une nouvelle voix magnifique de profondeur, sur une ballade médiévale à la fraicheur des highlands écossais. On voyage dont avec l’Orchestre puisque les rythmes sont essentiellement inspirés par l’Afrique noire, sa fièvre tribale entêtante, autant que des rêveries plus spirituelles.
Ça fait beaucoup de monde, beaucoup de qualificatifs des fois opposables, l’OTPMD pourrait se résumer par l’oxymore de la puissance délicate, comme l’est le morceau Lost & Found. Les morceaux en français pourraient résumer leur philosophie « nous avançons nous avançons / le front comme un delta / à force d’avoir haï toutes les servitudes / nous sommes devenus des bêtes féroces/ de l’espoir » des vers empruntés au poète québecois Gaston Miron, Danser par soi même pousse à voir la beauté autour de soi, l’Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp, c’est une révolution pacifique à lui tout seul !