Le Son du moment – Davodka / Sama

Si vous aimez, on a un CD à vous offrir…

Du haut de sa tour de contrôle, un artisan du mot qui claque, de la punchline qui sonne et du flow qui étourdit, regarde passer, avec le sourire de celui qui sait sa force, tous ceux qui s’imaginent pouvoir prendre sa place mais qui, la faute à un flow trop jeune, ne rappent qu’en slow-motion.
Davodka, lui, ne cherche pas la frime ou l’artifice, et se la joue old school, honorant avec un beat et des mots la résistance à une société qui ne fonctionne pas, utilisant la mine de son stylo comme arme de poing contre ces inégalités sociales qui condamnent les anges à devenir des démons. Dans la matrice de nos vies virtuelles, là où l’on ne vit trop souvent que pour les like, les vues, lui préfèrera toujours, sampleurs et sans reproches, dégoupiller des sons dangereux, des rimes qui retournent le couteau dans la paix, qui nous parlent de tout, de nous, de nos errances et de nos espoirs, de l’avenir et du passé, juste pour être connecté au temps qui passe parfois aussi vite que son flow. A juste titre, il ne se complaît pas dans le futile ou l’inutile, préférant de loin privilégier le sens à la forme. Un peu plus de quinze ans que cela dure, depuis ses premiers pas dans Paris Pôle Nord, donc aucune raison pour que cela change, aucune chance pour qu’il cède aux sirènes de la facilité. Davodka sait d’où il vient, de cet underground où l’on ne demande rien à personne, où l’on se débrouille au quotidien, où l’on sait que le monde ne tourne pas rond sans comprendre pourquoi, où l’on se libère du mal sans fin lorsque les sons sont libres.
Des premiers mots posés à Paname à cette dernière tournée pour la route qui finira bien par arriver un jour, Davodka se joue des caricatures, des idées préconçues, multipliant les exercices deux styles pour parler autant à nos têtes qu’à nos coeurs, utilisant son fast-flow pour nous étourdir et nous séduire, pour nous embarquer dans un voyage aux
accents autobiographiques, un périple textuel où, loin des egotrips vains, il nous parle de création, d’insomnie et de jalousie, de nouvelles technologies et de déshumanisation, de garde à vue et des enfants du monde qui n’ont pas eu la chance de naître du bon côté du globe, de paternité et de rupture sentimentale, bref de tout ce qui fait, aujourd’hui comme hier, sa vie, celle de ceux qu’il croise tous les jours mais aussi, comme un effet miroir, la nôtre.
Et s’il ne se fait pas de film, c’est pourtant bel et bien la bande-originale d’une vie normale au coeur de la France d’en bas qu’il nous offre, vision lucide d’un cauchemar qui ressemble au quotidien pour beaucoup, d’un monde actuel où trop nombreux sont ceux qui restent sur le quai de la gare lorsque part le train de vie. Et s’il se sert de ses textes comme d’un pansement pour essayer d’atténuer la douleur, c’est avec la certitude que ses mots ont, tel le colibri de la légende, le pouvoir de faire bouger les lignes, ne serait-ce qu’un peu.

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